Origine et histoire de l'Église Saint-Martin
L'église Saint-Martin de Pont-à-Mousson, en Meurthe-et-Moselle, est une ancienne collégiale construite du XIIIe au XVe siècle et classée Monument historique sur la liste de 1840. À l'origine, elle est édifiée à la fin du XIIIe siècle pour l'ordre des Antonins sous le vocable de Saint-Antoine, en complément d'une maladrerie déjà présente en ville, et est consacrée par le vicaire général Adhémar de Monteil. Une première consécration a lieu en 1335, puis l'édifice primitif est remplacé dès la fin du XIVe siècle par l'église actuelle, achevée au début du siècle suivant. Louis d'Anjou, fils du roi René, y est inhumé. Après la création de l'université en 1572 par le pape Grégoire XIII, l'église est attribuée aux jésuites en 1574, qui l'utilisent jusqu'à leur expulsion du duché de Lorraine en 1768. Un incendie ravage l'une des tours en 1623, événement entouré d'une légende faisant intervenir le spectre de l'ancien prieur des Antonistes. En 1776, l'édifice est rattaché à l'ordre des chanoines réguliers et devient la chapelle du collège et de l'École royale militaire, puis, après de longues tractations, il remplace en 1786 l'église paroissiale du quartier de la rive droite sous le vocable Saint-Martin. Classée Monument historique dès la première liste, l'église fait l'objet de restaurations menées par différents curés, la municipalité demandant même son déclassement en 1880; au XIXe siècle, le portail sud est reconstruit dans un style néo-gothique et le portail occidental est restauré entre 1860 et 1878, des sculptures étant replacées dans les niches.
Sur la façade, les tours octogonales reprennent, en proportions réduites, le modèle de la cathédrale Saint-Étienne de Toul, ce qui explique la richesse de leur décor par rapport aux soubassements d'un gothique plus ancien, et ces tours ont servi de référence pour la façade flamboyante de Toul; la rosace et sa verrière évoquent la verrière d'Hermann de Münster sur la cathédrale de Metz. Le portail, richement décoré et inspiré de la cathédrale de Toul, a vu sa statuaire refaite au XIXe siècle après les destructions de la Révolution. Le transept, non saillant mais bien visible en élévation comme dans la tradition lorraine, occupait l'emplacement du jubé qui a été réutilisé au XVIIe siècle comme tribune d'orgue.
À l'intérieur, la sobriété du chœur gothique du XIIIe siècle et l'élégance de la nef du XVe siècle contrastent avec des éléments décoratifs classiques du XVIIIe siècle, intégrés dans le respect de l'édifice médiéval. L'ancien jubé, l'un des rares conservés en Lorraine, témoigne de la finesse du gothique flamboyant ; les jésuites l'ont déplacé vers 1610 pour en faire la tribune d'orgue. De nombreux motifs héraldiques des Antonins furent supprimés par les jésuites au début du XVIIe siècle, mais ceux-ci durent les restaurer après des procédures dans les années 1740. Les apports classiques proviennent des jésuites, actifs dans l'université voisine : le maître-autel et les décorations du chœur rappellent la cathédrale de Toul, les tableaux sont surmontés d'une corniche portant reliquaires et statues, la chaire est réalisée en 1739 sur des dessins du frère Thomas, les tableaux de Jacques Durand datent de 1745-1747, la voûte est restaurée en 1746 et le maître-autel de 1608 est repris en 1748. La chapelle Saint-Pierre-Fourier est décorée dans un style très italien, alternant marbre noir et pierre blanche, tandis que la chapelle Saint-François-Xavier illustre un baroque peu fréquent en Lorraine. Au Moyen Âge, un mur séparait les fidèles des antonistes, et le peuple venait s'y faire soigner.
Parmi les œuvres d'art remarquables figure la mise au tombeau dite « Sépulcre de Pont-à-Mousson », composée de treize personnages et réalisée vers 1420 par le Maître de Pont-à-Mousson, où l'on décèle des influences allemandes, champenoises et flamandes; la commande est traditionnellement attribuée à Baldemar-Johannis de Biebelnheim, qui dirigea la maison des Antonistes, mais des recherches plus récentes mettent en avant le mécénat de Robert Ier de Bar. Ce monument, l'un des plus anciens de ce type en Lorraine, a influencé les mises au tombeau ultérieures en Champagne et en Lorraine, notamment certaines œuvres de Ligier Richier. On remarque aussi des gisants médiévaux d'un chevalier et d'une princesse de Bar sous un enfeu plus récent, le tombeau armorié de Geoffroi de Kaysersberg († 1358) dans le bas-côté sud et le monument funéraire mural d'Esther d'Aspremont († 1592) du côté nord. L'ensemble témoigne de l'histoire religieuse, universitaire et artistique de Pont-à-Mousson et reste un lieu important du patrimoine lorrain.
